Les KPIs ne sont pas le problème. Leur mise en scène l’est.
Les KPIs échouent rarement par manque de data. Leur mise en scène empêche l’action. Comment le design rend les indicateurs réellement utiles.

Dans presque toutes les entreprises, les KPIs occupent une place centrale. Ils structurent les comités de pilotage, nourrissent les dashboards, orientent les décisions stratégiques. Et pourtant, malgré cette omniprésence, ils peinent souvent à produire l’effet attendu : éclairer, aligner, déclencher l’action.
On entend alors les mêmes reproches revenir en boucle : trop d’indicateurs, pas les bons, trop abstraits, trop éloignés du terrain. Mais dans la majorité des cas, le problème n’est pas le KPI lui-même.
Il est dans la façon dont on le donne à voir, à lire et à utiliser.
Autrement dit : dans sa mise en scène.
Un KPI sans intention de lecture est un chiffre inutile
Un KPI n’est jamais neutre. Il est regardé par quelqu’un, dans un contexte précis, avec une intention implicite : comprendre, arbitrer, décider, rassurer, alerter. Or, beaucoup de dashboards sont conçus sans se poser cette question fondamentale : à quoi doit servir ce chiffre, ici et maintenant ? Une première solution de design consiste à replacer chaque KPI dans une intention claire. Non pas en ajoutant du texte explicatif partout, mais en organisant l’interface autour des moments de décision.
Par exemple, un manager n’a pas besoin de voir en permanence l’ensemble des indicateurs de performance commerciale. Il a surtout besoin de savoir ce qui nécessite son attention aujourd’hui. Un design plus utile consistera à mettre en avant les écarts significatifs, les ruptures de tendance, les signaux faibles et reléguer le reste en arrière-plan.
Le KPI cesse alors d’être un chiffre figé. Il devient un déclencheur d’attention.

Passer du dashboard exhaustif au dashboard orienté action
L’une des dérives les plus fréquentes est la quête d’exhaustivité. On affiche tout, pour ne rien oublier. Mais cette logique produit l’effet inverse : elle dilue l’information et empêche toute lecture rapide. Une approche design plus mature consiste à assumer la hiérarchisation. Tous les KPIs ne méritent pas le même niveau de visibilité. Certains sont stratégiques, d’autres simplement contextuels.
Un bon design de dashboard introduit donc des niveaux de lecture. En surface, quelques indicateurs clés, directement liés à des décisions possibles. En profondeur, des données détaillées accessibles à la demande, pour ceux qui ont besoin d’investiguer. Cette logique est très proche de celle du design produit : on ne montre pas toutes les fonctionnalités en même temps. On guide l’utilisateur vers ce qui est utile dans l’instant.
Redonner du contexte aux chiffres grâce à la narration visuelle
Un chiffre isolé ne dit rien. Ce qui lui donne du sens, c’est son évolution, sa comparaison, son lien avec une action passée ou future. Le design peut ici jouer un rôle clé en introduisant une forme de narration visuelle. Non pas en racontant une histoire artificielle, mais en structurant l’information pour qu’elle soit compréhensible sans effort. Par exemple, montrer un KPI accompagné de son évolution récente, d’un point de repère clair (objectif, seuil critique, moyenne historique) et d’un indicateur de tendance change radicalement sa lecture. Le chiffre n’est plus seulement “bon” ou “mauvais”. Il devient interprétable.
Dans certains outils internes, on voit émerger des dashboards capables de raconter ce qui a changé depuis la dernière consultation. Ce simple principe “qu’est-ce qui est différent depuis la dernière fois ?” rend les KPIs immédiatement plus utiles.
Relier les KPIs aux leviers d’action concrets
Un autre problème majeur est la déconnexion entre les indicateurs et les actions possibles. On mesure, on observe, mais on ne sait pas quoi faire. Une solution design consiste à rapprocher le KPI de ses leviers d’influence. Non pas en automatisant la décision, mais en rendant visibles les relations. Dans un outil commercial, par exemple, un indicateur de baisse de transformation devient beaucoup plus utile s’il est directement relié aux segments concernés, aux étapes du pipeline impactées, ou aux actions récentes. Le KPI devient alors un point d’entrée vers l’analyse, pas une fin en soi.
Dans un ERP ou un outil financier, relier un indicateur de dérive budgétaire aux projets, équipes ou postes concernés permet au manager de passer naturellement de la lecture à l’arbitrage. Le design ne fait pas la décision à la place de l’utilisateur. Il réduit la distance entre le constat et l’action.
Adapter la mise en scène des KPIs aux profils utilisateurs
Un autre biais fréquent est de penser qu’un KPI est universel. Qu’il doit être présenté de la même manière à tous. Or, un même indicateur peut avoir des significations très différentes selon le rôle de celui qui le consulte. Un dirigeant cherche une vision synthétique et des signaux faibles. Un manager opérationnel cherche des leviers immédiats. Un expert métier cherche des détails et des causes.
Le design permet de répondre à cette diversité sans multiplier les outils, en adaptant la mise en scène selon les profils et les usages. Même donnée, mais pas la même lecture. Même KPI, mais pas le même niveau de détail.C’est une logique déjà bien connue dans le design d’interface, mais encore trop peu appliquée aux outils de pilotage.

Utiliser l’IA pour clarifier, pas pour complexifier
L’IA ouvre des perspectives intéressantes pour rendre les KPIs plus intelligents. Mais elle ne doit pas devenir un vernis supplémentaire. Une IA bien intégrée peut aider à mettre en lumière ce qui mérite d’être regardé, à expliquer une variation inhabituelle, ou à proposer des hypothèses. Mais son rôle doit rester au service de la lisibilité, pas de la surenchère analytique. Une bonne mise en scène consistera par exemple à faire apparaître une explication contextuelle uniquement lorsqu’un écart significatif est détecté, plutôt que de produire en permanence des commentaires automatiques.
Là encore, le design est essentiel pour décider quand l’IA parle, où elle intervient, et quand elle se tait.
Repenser les KPIs comme une expérience à part entière
Lire des KPIs est une expérience cognitive, mais aussi émotionnelle. Certains chiffres rassurent, d’autres stressent, d’autres paralysent. Ignorer cette dimension, c’est passer à côté d’une grande partie du problème. Un bon design de KPIs tient compte de cette réalité. Il cherche à créer une relation plus saine aux chiffres : moins punitive, plus pédagogique, plus orientée apprentissage que sanction.
Cela passe par la clarté, la contextualisation, et une mise en scène qui favorise la discussion plutôt que le jugement.
Rendre les KPIs réellement utiles grâce au design
Les entreprises n’ont pas trop de KPIs. Elles ont trop souvent des KPIs mal mis en scène. En repensant la manière dont les indicateurs sont présentés, hiérarchisés et reliés aux usages, le design permet de transformer des chiffres statiques en véritables outils de pilotage. Les KPIs ne sont pas le problème. Leur mise en scène l’est.
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