Le nécessaire renouveau de la recherche utilisateur
La recherche utilisateur doit évoluer : plus agile, plus stratégique et tournée vers l’avenir, elle est la clé pour créer des produits réellement utiles.

Depuis que je travaille dans le design produit, j’ai vu la recherche utilisateur passer par plusieurs phases. Il y a eu une époque où elle était presque marginale, réservée aux grandes entreprises ou aux projets les plus ambitieux. Puis elle est devenue une pratique de plus en plus courante, intégrée aux méthodes agiles, utilisée pour affiner les parcours et mesurer l’expérience.
Mais depuis quelques années, je sens qu’un tournant s’opère. Les outils évoluent, les attentes des utilisateurs changent, et le rôle même de la recherche est en train de se transformer. Je suis convaincu qu’il est temps de repenser notre manière de l’aborder, non pas pour la remettre en question, mais pour lui redonner toute sa pertinence.
Une pratique qui a perdu de son impact
Soyons honnêtes : dans beaucoup d’organisations, la recherche utilisateur s’est banalisée au point de perdre en valeur. On fait des entretiens à la chaîne, on mène des tests d’utilisabilité rapides, on collecte des verbatims qu’on range ensuite dans des présentations PowerPoint… mais au final, qu’est-ce qui change vraiment ?
J’ai assisté à des sessions où l’objectif semblait être « faire de la recherche » pour cocher une case plutôt que pour générer de véritables enseignements. Dans ce contexte, la recherche se réduit à un processus administratif qui rassure, mais qui n’apporte pas grand-chose au produit.
Et le problème, c’est que cette superficialité crée de la frustration : les designers se sentent déconnectés de la réalité, les équipes produit s’impatientent et les décideurs finissent par douter de l’intérêt de financer ces démarches.
Les défis qui nous obligent à évoluer
Si la recherche utilisateur doit se réinventer, c’est parce que le monde dans lequel elle s’inscrit a profondément changé.
Les attentes des utilisateurs sont devenues plus complexes. Nous ne sommes plus simplement en train d’optimiser des interfaces web ou mobiles. Nous concevons désormais des systèmes où s’entremêlent humain et intelligence artificielle, où les interactions dépassent l’écran pour s’étendre aux objets connectés, à la voix, aux environnements immersifs.
En parallèle, les entreprises sont confrontées à une pression constante : aller plus vite, réduire les coûts, livrer en continu. La recherche ne peut plus se permettre de ralentir les projets. Elle doit être intégrée dans le flux, devenir plus agile, plus ciblée et surtout plus directement connectée aux décisions stratégiques.
Sortir du rôle d’« observateur »
Pendant longtemps, la recherche s’est focalisée sur l’observation. On se contentait d’analyser ce que les utilisateurs faisaient, de noter leurs réactions, d’identifier les points de friction. C’était utile, mais ce n’est plus suffisant.
Aujourd’hui, je pense que la recherche doit aller au-delà. Elle doit contribuer à imaginer des scénarios futurs, à anticiper des usages qui n’existent pas encore, à nourrir la vision du produit bien avant la phase de test. Ce rôle prospectif est essentiel, surtout à l’heure où l’intelligence artificielle bouleverse nos manières d’interagir avec la technologie.
Dans mes projets récents, je n’ai pas seulement observé ce que faisaient les utilisateurs : j’ai essayé de comprendre ce qu’ils pourraient faire demain si certaines conditions évoluaient. Parfois, cela signifie tester des prototypes encore très bruts, parfois juste confronter des idées à des groupes restreints pour mesurer leur potentiel.
Des méthodes à repenser
Je crois aussi que nous devons sortir d’une vision trop rigide de la recherche. Pendant des années, nous avons accumulé des protocoles, des métriques, des frameworks. Ils sont utiles, bien sûr, mais ils ne doivent pas devenir des carcans.
Ce que je constate, c’est que la richesse de la recherche vient souvent de la combinaison des approches. Un test rapide sur un prototype peut être aussi éclairant qu’une série d’entretiens approfondis, si on sait le placer au bon moment. Une donnée quantitative peut confirmer ce qu’une observation qualitative avait mis en évidence.
L’enjeu n’est pas d’appliquer une méthode parfaite, mais de choisir celle qui permet d’apporter le plus de clarté à l’équipe produit à l’instant T. En ce sens, la recherche devrait se penser comme un outil modulable, capable de s’adapter aux contraintes tout en gardant son exigence.

Redonner du sens aux résultats
Un autre changement que je défends, c’est la manière de communiquer les résultats. Trop souvent, les livrables de recherche sont des rapports interminables ou des présentations trop génériques. L’information existe, mais elle ne déclenche aucune action.
Pour moi, un bon travail de recherche ne se mesure pas au nombre de slides produites, mais à sa capacité à influencer les décisions. Cela signifie présenter les enseignements de manière claire, concise, reliée directement aux choix que l’entreprise doit faire. Cela veut dire aussi impliquer les parties prenantes dès le départ, pour que la recherche ne soit pas perçue comme un document externe mais comme une base commune de réflexion.
La recherche comme moteur stratégique
Plus j’avance dans ma pratique, plus je suis persuadé que la recherche doit occuper un rôle stratégique. Elle ne doit pas seulement valider ce que les designers ou les product managers ont imaginé. Elle doit être une force de proposition, un moyen d’orienter le produit, de questionner les évidences, de révéler des opportunités que personne n’avait vues.
Dans un contexte où les entreprises cherchent à se différencier, c’est souvent la qualité de l’expérience qui fait la différence. Et cette qualité ne s’improvise pas : elle se construit à partir d’une compréhension fine des usages, des frustrations et des aspirations.
Conclusion
La recherche utilisateur est arrivée à un moment charnière. Elle ne peut plus se contenter d’être un processus figé qui observe et valide. Elle doit évoluer pour devenir plus agile, plus stratégique, plus prospective.
Cela implique de revoir nos méthodes, de simplifier nos livrables, d’impliquer davantage les équipes et surtout de replacer la recherche au cœur des décisions. C’est à ce prix qu’elle retrouvera toute sa puissance et qu’elle continuera à jouer son rôle essentiel dans la création de produits utiles, désirables et durables.
Pour moi, le renouveau de la recherche n’est pas une option : c’est une nécessité. Et c’est en l’embrassant pleinement que nous pourrons redonner à notre discipline l’impact qu’elle mérite.
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