La fin du design d’interface
Le design d’expérience vit une révolution : les écrans disparaissent au profit de conversations entre humains et systèmes intelligents. Nous ne concevons plus des interfaces, mais des espaces où la machine comprend, interprète et agit. Le rôle du designer change : il ne dessine plus des écrans, il oriente le sens, crée la confiance et structure le dialogue entre l’utilisateur et l’IA. Le futur de l’UX n’est plus visuel, il est cognitif, contextuel et conversationnel.

Je m’en souviens encore : la première fois que j’ai vu la démo d’OpenAI lors du DevDay 2025, j’ai eu la sensation de vivre la fin d’une époque.
Pendant plus de dix ans, j’ai conçu des écrans. J’ai peaufiné des pixels, affiné des marges, cherché cette perfection invisible que seul un designer peut remarquer. C’était ma passion, mon métier, mon langage.
Et soudain, tout cela semblait appartenir au passé. L’expérience utilisateur celle que j’ai passée ma carrière à façonner sur des interfaces ne vit plus sur un écran. Elle vit désormais dans une conversation. Ce basculement n’est pas seulement technologique : c’est un changement de paradigme. Nous ne concevons plus des interfaces. Nous concevons des systèmes qui comprennent, interprètent et agissent.
La perfection du pixel n’est plus notre horizon
Pendant des années, nous avons assimilé le “bon design” à la maîtrise de la complexité : des parcours fluides, des écrans clairs, des formulaires rationalisés.
Nous pensions que la simplicité venait de la structure.Mais ce modèle s’effondre. Avec les interfaces conversationnelles, tout change. L’utilisateur ne “parcourt” plus une application : il exprime une intention.
“Je veux réserver un vol pour Rome.”
“Prépare-moi une réunion d’équipe demain.”
“Trouve un hôtel près du centre, avec salle de sport.”
Derrière ces phrases, dix écrans de formulaires disparaissent. Les flux, les étapes, les boutons, tout ce qui structurait notre métier s’efface. L’interface s’évapore mais l’intention, elle, reste. Et c’est elle, désormais, qui devient notre matière première.
Quand la navigation devient une conversation
L’époque où l’on pensait les parcours comme des couloirs à franchir touche à sa fin. Les utilisateurs n’ont plus besoin de “naviguer”.
Ils formulent un besoin, et le système agit.
C’est un bouleversement profond :
- plus de hiérarchie d’écrans,
- plus de menus,
- plus de mise en scène visuelle.
L’expérience devient cognitive, pas spatiale. Mais une question fascinante se pose : si l’utilisateur ne voit que ce qu’il demande, comment découvrira-t-il ce qu’il ignore encore ?
C’est là que naît la nouvelle frontière du design : créer des systèmes capables d’élargir la conscience de l’utilisateur sans l’enfermer.
La fin de l’attention, le début de la confiance
Pendant longtemps, l’économie numérique s’est nourrie de l’attention : clics, vues, bannières, notifications. Avec les interfaces conversationnelles, ce modèle s’effondre. Il n’y a plus d’espace pour la publicité intrusive, ni pour les compromis entre design et marketing. Dans une interface vocale ou textuelle, l’utilisateur ne tolère qu’une seule chose : la confiance. Chaque mot compte. Chaque réponse doit être honnête, transparente, explicable. Le design ne cherche plus à capter l’attention : il cherche à mériter la confiance.

Le contexte devient l’interface
Alors si l’écran disparaît… que reste-t-il à concevoir ? La réponse, c’est le contexte. Le design n’est plus une affaire de pixels, mais de protocoles. Chaque interaction devient un contrat :
un échange clair entre ce que l’utilisateur veut et ce que le système peut faire. Le designer ne définit plus des boutons, mais des règles d’interprétation. Il n’organise plus une page, il oriente une logique.
Concrètement :
- Nous passons des pixels aux protocoles : chaque outil définit ses capacités et ses limites.
- Une intention = un module : la simplicité n’est plus esthétique, elle est structurelle.
- Les métadonnées deviennent du design : décrire clairement une action, c’est déjà concevoir l’expérience.
Nous ne dessinons plus des écrans. Nous dessinons la couche de raisonnement entre l’intention humaine et l’action machine.
Concevoir dans les règles du système
C’est sans doute la partie la plus déroutante pour un designer : perdre le contrôle visuel. Les couleurs, les typographies, les hiérarchies visuelles tout cela est désormais géré par le système.
Fini les identités visuelles sur mesure, les mises en page expressives, les détails esthétiques subtils.
À la place :
- des interfaces normalisées, où tout répond à des contraintes communes,
- des “cartes” intégrées dans le flux conversationnel,
- et des vues contextuelles, qui s’ouvrent et se ferment sans jamais interrompre le dialogue.
C’est frustrant, au début. Mais c’est aussi libérateur. Parce que quand on ne peut plus séduire par la forme, on est obligé de convaincre par le sens.
Le nouveau rôle du designer : architecte de confiance et d’intention
Ce que nous vivons n’est pas la mort du design. C’est sa métamorphose. Notre responsabilité ne consiste plus à choisir la bonne police ou à équilibrer des grilles. Elle consiste à rendre la technologie intelligible.
Notre métier, désormais, c’est :
- de rédiger les intentions de manière compréhensible pour les IA,
- de guider les modèles grâce à des signaux contextuels clairs,
- de préserver la continuité entre chaque échange, pour que la conversation reste fluide.
En d’autres termes, nous ne sommes plus des architectes d’écrans. Nous sommes devenus des architectes du sens.

Vers une UX invisible mais plus humaine
L’expérience utilisateur n’a pas disparu : elle s’est déplacée. Elle n’habite plus les surfaces visuelles, mais les espaces de dialogue entre les humains et les systèmes. Et si cette disparition du visible était, en réalité, le retour du sens ? Quand la forme s’efface, il ne reste plus que l’intention et la relation. Concevoir pour l’intention, c’est concevoir pour ce qu’il y a de plus humain : la clarté, la confiance, et la compréhension mutuelle. C’est peut-être là, paradoxalement, que commence la plus belle ère du design.
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